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Les débuts du design d’interfaces : deux documents d’archives

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En février 1956, Eliot Noyes est recruté par l’entreprise IBM pour repenser l’image de la marque selon une approche globale. Plusieurs designers et architectes sont alors recrutés (Edgar Kaufmann, Charles Eames, George Nelson, Paul Rand, entre autres). Dans cet article, John Harwood (1973-) donne à voir les prises de positionnements constitutifs chez IBM au design des ordinateurs et des interfaces. Harwood analyse deux notes internes : la première est écrite par Edgar Kaufmann (critique d’art et d’architecture) en 1957, la seconde par Serge Boutourline (ergonome) en 1964. Kaufmann avance une métaphore domestique pour concevoir l’utilisation d’ordinateurs en proposant d’installer la même distinction entre les espaces servants (à dissimuler) et les espaces servis dans une maison (une distinction forgée par l’architecte Louis Kahn). Boutourline propose un positionnement commercial basé sur une approche centrée sur l’utilisateur non-spécialiste afin qu’IBM acquérisse la réputation de se soucier de ce dernier. Texte proposé par Vincent Maillard.

Introduction

Les documents transcrits ici représentent deux moments cruciaux dans la conception de l’ordinateur. Le premier est un court mémorandum – qui ressemble davantage à un ensemble de notes légèrement formalisées – écrit par le critique d’art et d’architecture Edgar Kaufmann Jr. à Eliot Noyes au milieu de l’année 1957. En 1956, Noyes avait engagé Kaufmann, ainsi que Charles Eames, George Nelson et Paul Rand, pour l’aider dans le cadre de l’« IBM Design Consultancy » – une campagne de vingt ans visant à repenser chaque aspect d’IBM et à développer pour la société des moyens pour se transformer.

Les notes de Kaufmann détaillent ses « impressions » et ses « intuitions » Fig. 1 concernant la conception des interfaces d’ordinateur1, en partie forgées par sa connaissance de la salle d’exposition d’IBM conçue par Noyes pour les ordinateurs IBM 702 et 705, au siège de la société sur Madison Avenue, et de la gamme la plus récente d’ordinateurs produits par General Electric. Comme il le note dans son mémorandum à Noyes, cette dernière visite « [lui] a servi à confirmer [ses] idées » concernant les défauts des ordinateurs d’IBM, dont les interfaces ont été conçues par Noyes en collaboration avec le cabinet de design industriel Sundberg-Farrar et l’équipe interne d’ingénieurs d’IBM.

Comme je l’ai expliqué en détail dans mon récent ouvrage The Interface, les notes de Kaufmann2 ont complètement transformé l’approche adoptée par Noyes pour redessiner les produits d’IBM. Dans le plus pur style moderniste, la réponse initiale de Noyes à ce qu’il appelait la « schizophrénie du design » d’IBM avait été de « dépouiller » les surfaces maniérées, encombrées et inélégantes de ces machines complexes3. En ouvrant ces surfaces opaques, il avait pour objectif de révéler – son langage de révélation ainsi que la référence biblique manifeste sont ici parlants – la « tunique de plusieurs couleurs » qui était dissimulée à l’intérieur. Entourés non pas par de complexes conteneurs en acier, mais plutôt par de simples cadres, recouverts uniquement de vitres transparentes, les opérateurs de l’ordinateur seraient en mesure, selon Noyes, de saisir la véritable essence de l’ordinateur.

La proposition la plus réussie, mais toujours problématique, issue de cette réforme moderniste de l’ordinateur a été le RAMAC (Random-Access Memory Automatic Computer) d’IBM, datant de 1956. Le lieu principal de l’intervention de Noyes dans la conception de cet ordinateur était le compartiment du disque dur, un tambour rotatif de disques magnétiques qui permettait à la machine d’accéder rapidement aux programmes stockés et de les réécrire. Le reste des dispositifs d’entrée/sortie (E/S) de l’ordinateur, pour des raisons techniques que Noyes n’avait pas encore totalement comprises, restaient plus ou moins les mêmes que dans les modèles IBM précédents.

Le design de Noyes pour le RAMAC lui a valu de grands éloges (et une médaille) de la part de la presse spécialisée dans le design industriel de l’époque ; cependant, les ingénieurs en informatique et les opérateurs ont remarqué que la noble rhétorique de la révélation qui avait motivé le design n’avait guère amélioré les choses. Non seulement la machine ressemblait à un « juke-box » un peu trop compliqué4, mais surtout elle ne fonctionnait que comme un geste symbolique. Le ronronnant tambour, bien que spectaculaire, était plus une distraction pour les opérateurs de la machine qu’autre chose.

C’est alors que Kaufmann entre en scène. Au moment où IBM s’apprêtait à investir la totalité de sa valeur nette dans le projet radical de conception d’un « système » d’ordinateurs compatibles entre eux, connu sous le nom de projet SPREAD et, plus tard, de System/360 (1964), Kaufmann a souligné l’absurdité de l’approche de Noyes tout en offrant des pistes attrayantes sur la bonne marche à suivre.

Un simple exercice de comparaison entre les images des ordinateurs d’IBM avant et après le mémo de Kaufmann devrait suffire à convaincre le lecteur de l’influence de nombre de ses observations ; cependant, une observation en particulier mérite un peu d’explication pour le lecteur qui rencontre ces idées pour la première fois. Dans « Hunch C », Kaufmann fait référence à deux concepts clés dans la conception industrielle de l’ordinateur : la « technique de la montre en or du grand-père » et la « division du salon et de la cave à charbon ».

Ces deux concepts représentent les deux faces d’une transformation historique dans la conception des ordinateurs. Avec la première métaphore, Kaufmann décrit la nature structurelle et spatiale fondamentale de l’informatique qui avait prévalu depuis l’invention de l’ordinateur juste avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Ces premières machines, qui exigeaient un accès quasi permanent aux composants mécaniques et électriques, étaient conçues comme une montre à gousset. Un couvercle (une pièce conçue spécialement avec un contrôle de la température, une filtration de l’air, etc. pour réguler les fluctuations électromagnétiques) dissimulait un cadran d’horloge (composé des systèmes d’entrée/sortie représentant les processus à l’intérieur des machines et offrant les moyens de les contrôler), qui à son tour dissimulait le mécanisme d’horloge (l’unité centrale et la mémoire). Les nouvelles conceptions de l’ordinateur IBM par Noyes ont peut-être rendu cet arrangement légèrement plus agréable – d’où la montre « en or » plutôt qu’en laiton, par exemple – mais elles sont restées bien loin d’une réarticulation plus agressive des aspects spatiaux de la machine.

La métaphore du « salon-cave à charbon » à laquelle Kaufmann fait référence est justement une réarticulation de ce type. Au lieu d’imbriquer l’un dans l’autre chaque composant de l’« architecture » de l’ordinateur, Kaufmann propose de réorganiser ces composants d’une manière semblable à la séparation entre les espaces servants et les espaces servis d’une maison. Les composants de l’ordinateur qui, pour des raisons de sécurité et d’ergonomie cognitive, doivent être séparés de l’espace des opérateurs informatiques, et dont la fonction et la signification ne seraient lisibles que par des ingénieurs hautement spécialisés, pourraient être enterrés dans la « cave à charbon ». Cela ouvrirait l’espace du salon – l’espace des opérateurs – à de plus grandes possibilités de conception : le « drame » auquel Kaufmann fait si justement référence. Bien que la refonte ergonomique du salon soit toujours régie par des contraintes techniques et perceptives strictes, la métaphore domestique de Kaufmann ouvre véritablement l’ère de la conception d’interfaces informatiques, bien avant l’avènement des interfaces graphiques conçues par Ivan Sutherland et al. Son impact sur Noyes et IBM Design Consultancy est immédiat, et le concept de salon et de cave à charbon devient finalement la force motrice de la conception du System/360, avec son dispositif d’unités « murales » et « modulaires ».

Le second document est également un mémorandum, envoyé par le jeune ergonome d’IBM Serge Boutourline Jr. à son plus haut patron, le directeur de la recherche d’IBM Robert S. Lee, en 19645. Rédigé à une date étonnamment précoce, bien avant que les cartes perforées ne soient brûlées sur les campus universitaires ou que les discours enflammés de Noam Chomsky ou de Ralph Nader ne dénoncent les excès du bureaucratisme et de la technocratie, le mémo de Boutourline offre une vision sans précédent et exceptionnellement perspicace des problèmes multiples et complexes auxquels sont confrontés l’« utilisateur » et l’entreprise à mesure que l’ordinateur passe du statut de pièce rare dans l’équipement militaire, scientifique et commercial à celui de média de masse. À l’instar du récent ouvrage de Fred Turner, From Counterculture to Cyberculture, qui rend compte de manière impressionnante et détaillée de la montée en puissance de la rhétorique pseudo-post-idéologique de la cybernétique et de l’informatique6, la note de Boutourline trace les failles d’une infrastructure d’information de plus en plus élaborée et avance, dans des termes qui seront familiers à n’importe quel lecteur d’aujourd'hui, que les principaux problèmes de l’informatique en tant que média de masse ne sont pas d’ordre technique, mais rhétorique et politique.

Lee a transmis la note à Charles Eames, qui a fait un usage intensif des observations de Boutourline dans le plus grand projet du Eames Office : une campagne de dix ans pour concevoir un « Musée IBM » à côté du nouveau siège social de l’entreprise à Armonk (New York). Si Eames a reconnu les difficultés soulevées dans le mémo de Boutourline, tant dans sa conception du projet que dans de nombreuses conférences publiques tout au long des années 1960, il s’est également attaqué implicitement aux suggestions trop innocentes du jeune scientifique sur la manière d’y répondre. Plutôt que de s’inquiéter du fait que le problème de l’entreprise (et, par extension, du concepteur) était de convaincre le « public » qu’IBM avait ses intérêts à cœur, Eames a suggéré qu’IBM s’engage plutôt dans une campagne de propagande multimédia qui, à la fois, apaiserait la crainte de l’ordinateur chez les gens par une intimité forcée qui naturaliserait le nouvel appareil en tant qu’un simple outil pratique et convaincrait le public que l’ordinateur est une technologie totalement révolutionnaire qui redéfinira complètement le monde moderne comme par magie7.

Transcription du mémorandum de Boutourline

DE : Serge Boutourline, Jr. 

À : Dr. Robert S. Lee

DATE : 24 novembre 1964

RE : La relation commerciale d’IBM avec les utilisateurs non spécialistes de l’informatique

Résumé

Ce mémo développe quelques conséquences pour IBM si deux hypothèses sont faites sur l’utilisateur non spécialiste de l’informatique :

  1. L’utilisateur non spécialiste de l’informatique aura bientôt une influence d’achat importante dans la plupart des organisations et pourrait éventuellement être un facteur d’achat majeur pour de nombreuses communautés d’utilisateurs.
  2. L’utilisateur non spécialiste de l’informatique attendra et voudra qu’IBM ait une responsabilité envers lui personnellement, indépendamment des agents intermédiaires entre IBM et cet utilisateur. Cette responsabilité sera probablement de différente qualité de celle qu’IBM a actuellement envers ses clients.

Sur la base de ces hypothèses, le mémo développe de manière plus détaillée trois conclusions principales :

  1. IBM doit développer une nouvelle relation de vente avec les utilisateurs non spécialistes de l’informatique.
  2. IBM pourrait tirer profit d’une identité « centrée sur l’individu » auprès du public d’utilisateurs non spécialistes.
  3. Des plans d’action et des politiques claires d’IBM, fondés sur l’analyse des facteurs critiques de la nouvelle situation commerciale, doivent soutenir les programmes de communication.

La principale recommandation d’action de ce mémo est que les hypothèses de ce mémo soient évaluées en développant certaines mesures explicites de « l’importance pour IBM » des utilisateurs non spécialistes de l’informatique (pour cette année et les années futures). Si ces non-spécialistes ont une valeur commerciale importante pour IBM, alors le mémo peut suggérer un cadre analytique pour le développement futur du programme.

Le nouveau public d’utilisateurs

Ce mémo part du principe qu’IBM parviendra à élargir le nombre d’utilisateurs des systèmes actuels et que ces utilisateurs ne deviendront pas des experts en informatique mais utiliseront simplement les services informatiques dans le cadre de leur travail quotidien.

Ce mémorandum ne défend pas la mise en œuvre à grande échelle de terminaux de calcul en ligne, de systèmes de recherche d’informations ou de machines pour l’enseignement par ordinateur. Le développement commercial de ces applications renforcerait, je pense, considérablement la position adoptée dans le mémo et des références ont été faites à ces applications. Mais les conclusions de la note ne dépendent pas du développement commercial d’une de ces applications futures et sont formulées dans le contexte de l’équipement actuel et des modes d’accès actuels à l’ordinateur.

Le nouveau public d’utilisateurs se distingue donc par sa taille, son contact occasionnel avec les services informatiques, son manque d’expertise en matière d’informatique, et aussi par la diversité des fonctions que les services informatiques jouent dans ses activités professionnelles individuelles.

Le nouvel environnement commercial

IBM s’est toujours intéressée et préoccupée de l’efficacité et du bien-être des utilisateurs de ses équipements et services. Bien que ces utilisateurs n’aient que rarement, voire jamais, payé eux-mêmes les factures de location, IBM a toujours compris que si ces utilisateurs trouvaient leurs habitudes d’utilisation désagréables ou inefficientes, les entreprises clientes en seraient éventuellement affectées et les activités d’IBM en souffriraient.

Quelles sont les caractéristiques de l’utilisateur non spécialiste de l’informatique qui laisse supposer qu’IBM doit établir une nouvelle relation commerciale avec lui ?

Un grand nombre potentiel d’utilisateurs non spécialistes

Plus que tout, c’est le grand nombre potentiel d’utilisateurs non spécialistes de l’informatique qui me fait penser qu’une nouvelle relation commerciale doit être développée par IBM. On ne peut pas traiter un million de personnes de la même manière que dix mille.

Une part de la confiance qu’un petit nombre d’individus dans une entreprise utilisatrice d’ordinateurs accordait au fait d’être servi par un employé d’IBM qu’ils connaissaient personnellement, doit être remplacée par la conviction pour un plus grand nombre de personnes qu’elles seront servies par une personne qu’elles n’ont jamais rencontrée auparavant et qu’elles ne rencontreront peut-être jamais plus. Le traitement des préoccupations individuelles de dirigeants, auparavant réalisable par chaque vendeur, doit maintenant être fait plus explicitement et publiquement dans les échanges avec des publics d’utilisateurs plus larges.

Même le retour d’information sur les attitudes, les problèmes et les attentes des clients à l’égard d’IBM, qui pouvait auparavant être obtenu à partir des rapports des vendeurs, doit maintenant être récolté de manière plus attentive et plus explicite à partir de l’analyse des études des groupes d’utilisateurs.

Enfin, même les arguments de vente sont moins faciles à livrer par un vendeur lorsqu’un large public d’utilisateurs constitue l’acheteur potentiel. Là encore, une sorte d’indétermination s’insinue dans le tableau à mesure que le nombre de personnes augmente et que le contact direct entre le personnel et les acheteurs diminue.

Il semble que lorsque le nombre de personnes à traiter dans un système augmente, l’aspect informel et les interprétations variées des échanges de personne à personne doivent être remplacés par une analyse plus minutieuse des caractéristiques essentielles de ces nombreux individus et par des plans d’action plus précis pour les gérer efficacement. De même, les réactions du public doivent être plus précises pour être utiles. Mais il s’agit là de spéculations générales sur ce qui se passe lorsque le nombre de personnes concernées augmente. Le point important est que le nombre d’utilisateurs non spécialistes de l’informatique est susceptible d’augmenter considérablement dans les installations informatiques d’IBM et que le traitement de ce public est susceptible d’exiger des changements de technique qui sont attribuables uniquement au nombre accru de personnes.

Une diversité des exigences d’utilisation

On peut s’attendre à ce que chaque utilisateur non spécialiste ait une situation de travail qui, d’une certaine manière, lui sera propre. C’est peut-être l’utilisation qu’ils ont des ordinateurs qui rendra leur relation aux services informatiques personnalisée. Ce sera peut-être le fait qu’ils ont besoin d’un service très rapide, qu’ils utilisent des types particuliers de programmes ou qu’ils disposent d’un type particulier de données. Peut-être que la nature de leur utilisation des services informatiques variera au fil du temps ou qu’ils devront eux-mêmes développer et adapter des procédures pour maximiser le rendement des services informatiques dans leur situation de travail. Peut-être qu’une pression professionnelle inattendue ou un besoin personnel les amènera à exiger des services informatiques particuliers.

Ainsi, alors que la plupart du temps une personne peut avoir des exigences routinières et prévisibles à la plupart des égards, il est très probable que chaque utilisateur aura tout de même des exigences uniques. Le nombre de demandes inhabituelles et l’éventail des types de demandes adressées aux systèmes informatiques sont susceptibles d’augmenter avec le nombre d’utilisateurs, leur fréquence d’utilisation, le nombre de modalités d’utilisation et la dimension non spécialiste de la population des utilisateurs.

Pour IBM, cela signifie que les critères qui constituent l’expression « service adéquat » sont susceptibles de devenir beaucoup plus diversifiés et donc plus indéterminés sur le plan opérationnel. IBM sera moins en mesure d’affirmer rationnellement que son équipement fournit un « meilleur » service, car le terme « service » commencera à prendre une multitude de significations individuelles, définies par le temps et par la situation. Dans ce contexte, il me semble qu’IBM doit créer de nouvelles procédures de ventes de ces services pour répondre efficacement à une multiplicité de situations individuelles.

La dimension non spécialiste des utilisateurs

Qui porte le « blâme » si quelque chose ne va pas dans une interaction d’utilisation particulière ? Si l’expérience commune doit servir de guide pour répondre à cette question, nous pourrions conclure que plus une personne a tendance à s’impliquer personnellement, plus elle a tendance à blâmer quelque chose ou quelqu’un d’autre pour ses problèmes. Il ne s’agit pas de discréditer des personnes rationnelles qui deviennent complètement irrationnelles, mais simplement de dire que l’on souhaite parfois que le monde extérieur soit différent de ce qu’il est à certains moments, par exemple, lorsqu’on est coincé dans un trafic automobile intense. Peut-être est-ce de votre faute si vous avez décidé de voyager à ce moment-là, mais vous envisagez le problème différemment. Vous savez que vous deviez vous rendre à un certain endroit à une certaine heure et que vous n’auriez pas pu partir plus tôt ou prendre une autre route. Dans ces circonstances, l’affirmation d’un ingénieur des ponts et chaussées selon laquelle « la route est adéquate » est non seulement fausse pour vous (compte tenu de vos besoins actuels), mais elle risque d’être considérée comme une déclaration selon laquelle, en ce qui le concerne, le service que vous obtenez lui convient (ce qui implique soit qu’il ne vous aime pas, soit qu’il pense que d’autres personnes à d’autres moments sont plus importantes ou, pire encore, qu’aucune personne raisonnable ne se serait mise dans le type de situation que vous essayez de satisfaire).

Mais le degré d’implication personnelle immédiate ne fait pas tout. Nous savons que l’ingénieur des ponts et chaussées qui emprunte la même route au même moment et qui se trouve dans la même situation réagira quelque peu différemment de celui qui n’est pas ingénieur des ponts et chaussées. Il pourrait être tout aussi désireux de voir le monde extérieur changer (même si, là aussi, c’est sa « faute » s’il a choisi de voyager à ce moment-là et de cette manière), mais il aura tendance à répartir les responsabilités. Ce seront les concepteurs de l’échangeur qui seront en faute, et peut-être le système de contrôle du trafic, voire les conducteurs eux-mêmes et les fabricants des voitures qu’ils conduisent. Le non-spécialiste des autoroutes, quant à lui, rejettera la faute sur la « ville de New York », « Los Angeles » ou une autre grande agence qui a vraisemblablement la responsabilité globale de la plupart des facteurs qui, selon l’utilisateur, affectent sa situation à ce moment précis. Et comme le non-spécialiste ne se rend pas compte du peu de choses que ces agences peuvent changer (étant donné les contraintes qui pèsent sur elles et le petit nombre de facteurs de la situation actuelle qu’elles contrôlent d’une manière ou d’une autre), il a tendance à blâmer davantage ces agences que l’ingénieur des ponts et chaussées, car il leur attribue beaucoup plus de contrôle sur la situation qu’elles n’en ont réellement.

Mais ce n’est pas tout, car en plus de l’ingénieur autoroutier, il y a l’ingénieur non autoroutier. Les deux n’ont que peu, voire pas du tout, de liberté d’action dans leur façon de conduire, ce qui affectera sérieusement cette situation globale (qu’ils soient sur cette route à ce moment-là avec cette destination et cet horaire). Peu importe qu’ils roulent pare-chocs contre pare-chocs ou qu’ils accélèrent aux feux, ils n’arriveront pas beaucoup plus vite. Leur situation ne peut être affectée par leurs actions à ce moment-là. Pourtant, l’ingénieur des ponts et chaussées, en comprenant les possibilités dont il disposait et les grandes contraintes qui font qu’il est peu probable qu’une seule agence soit responsable de cette situation, est plus susceptible de commencer à se concentrer sur lui-même comme cause de la faute. Il verra que la personne qui disposait du plus grand pouvoir discrétionnaire dans la situation dans laquelle il se trouve était lui-même. Et dans ce cas, il commencera à réfléchir à la manière dont il pourrait éviter que ce type d’erreur de programmation se reproduise. L’ingénieur non autoroutier, quant à lui, ne se contentera pas d’accuser la « ville » d’être la cause principale de ses difficultés, mais il le fera surtout lorsque le nombre de possibilités dépassera sa capacité à trancher rationnellement entre eux. L’expression « Un mauvais ouvrier blâme ses outils » s’applique à la personne qui, pour une raison ou une autre, reste dans une méconnaissance du fonctionnement des choses. C’est la marque d’une personne qui est, ou a décidé d’être, pour toujours, étrangère à un processus causal.

La signification de ce qui précède pour IBM est simplement la suivante : les nouveaux utilisateurs non spécialistes sont des amateurs, leurs exigences spécifiques sont susceptibles d’être à la fois très nombreuses et quelque peu imprévisibles. La « causalité » d’un dysfonctionnement pour un individu particulier est susceptible d’être très complexe (incluant divers agents intermédiaires entre l’utilisateur et la machine, la charge de travail sur le système, etc.). Il s’agit clairement d’une situation dans laquelle il est probable, voire inévitable, qu’IBM soit « blâmée » pour diverses déficiences de service par des utilisateurs non spécialistes. Il est clair qu’il s’agit également d’une situation où l’on ne peut pas s’attendre à ce que de nombreux utilisateurs sachent que les modèles d’utilisation possibles augmentent en nombre et changent constamment. Il est clair qu’il est dans l’intérêt d’IBM de développer des moyens de minimiser les reproches qui lui sont faits dans des situations où sa capacité à traiter directement et personnellement les problèmes de l’utilisateur est limitée.

La nouvelle relation commerciale se caractérise donc par des situations où IBM est plus susceptible d’être blâmée pour des problèmes, alors que l’accès à la situation problématique sera beaucoup plus limité qu’aujourd’hui et avec souvent moins de contrôle sur la cause des difficultés rencontrées. Un utilisateur ne représente pas une valeur monétaire importante et, en tant qu’individu, il est difficilement accessible, cependant un public de tels utilisateurs peut représenter un temps d’utilisation élevé. Ce qui est encore plus important, c’est la probabilité que le rapport entre le temps d’utilisation d’un ordinateur par un utilisateur et la valeur en dollars des activités internes de l’entreprise affectées par l’expérience d’utilisation du système informatique augmente considérablement. Plus l’interaction d’utilisation moyenne est petite, plus elle est fréquente, plus chaque interaction d’utilisation devient importante pour chaque utilisateur, plus ce rapport a des chances d’être élevé. Ce ratio n’est pas important pour IBM directement, mais il est susceptible de l’être pour la drection générale d’une entreprise, car il signifie que toute difficulté (quelle qu’en soit la raison) rencontrée par les utilisateurs dans l’interaction avec un ordinateur a, globalement, une signification économique importante pour leur entreprise. Pour la direction, cette préoccupation est susceptible d’être valable même si le nombre d’utilisateurs non spécialistes est encore faible, car ces premiers utilisateurs seront susceptibles d’occuper des postes plus importants dans leur entreprise. Du point de vue d’IBM, l’expérience de ces premiers utilisateurs avec leur équipement est doublement importante, car leur attitude à l’égard d’une utilisation plus large de l’ordinateur comme outil de travail quotidien est susceptible d’avoir une influence importante sur les attitudes d’autres non-spécialistes concernant l’utilité des services informatiques (en particulier les services informatiques d’IBM) dans des contextes de travail non spécialisés.

Une identité commerciale plus « centrée sur l’individu » pour IBM

De nombreux problèmes spécifiques doivent être résolus avant qu’IBM puisse développer des méthodes permettant de traiter efficacement les principaux aspects de la nouvelle relation commerciale décrite ici. Cette section se contentera d’esquisser les spécifications d’un type de relation que les utilisateurs non spécialistes pourraient développer avec IBM, au sein duquel les intérêts d’IBM seraient maintenus dans la nouvelle situation.

La principale croyance qu’IBM doit établir auprès du nouveau public d’utilisateurs est qu’IBM se soucie en principe de l’utilisateur individuel. Ce point est probablement aussi important pour le chef d’entreprise qui voit ses employés utiliser les services informatiques (et rencontrer parfois des difficultés) que pour les utilisateurs individuels. En établissant le principe qu’IBM se soucie de l’utilisateur individuel, on tend à rendre les gens plus disposés à prendre en compte les facteurs intermédiaires qui affectent les services informatiques, tels que les programmeurs et les planificateurs, ainsi que la possibilité qu’une partie de la faute soit imputable aux propres actions de l’utilisateur. Cependant, l’établissement de cette croyance a une fonction beaucoup plus profonde que le simple fait d’aider à déplacer le fardeau de la responsabilité des difficultés lorsqu’elles surviennent. Les utilisateurs doivent croire que s’ils ont des difficultés (pour quelque raison que ce soit), ils ont quelqu’un à qui s’adresser. Cela peut non seulement être important pour les utilisateurs, mais aussi aider IBM à obtenir rapidement et à peu de frais un retour d’information sur les difficultés du système, quelle que soit la cause de ces difficultés.

Cependant, la réputation qu’IBM se soucie de l’utilisateur individuel n’est pas susceptible d’être établie sans une preuve assez convaincante. Je suggère qu’IBM développe une argumentation qui démontre qu’en fait, son activité dépend aujourd’hui en grande partie de la qualité de l’expérience individuelle des utilisateurs, et que de nombreux éléments de l’avenir d’IBM vont dans le même sens. Ce type de démonstration, me semble-t-il, est absolument nécessaire en raison de l’association actuelle d’IBM avec des appareils à grande échelle où aucun humain ne bénéficie très directement du fonctionnement de l’appareil et où aucun humain n’est requis directement dans le cadre du fonctionnement de l’appareil lui-même.

Les nouveaux utilisateurs voudront avoir une réponse à la question : « Quelle importance ai-je pour IBM ? » Cela sera valable dans de nombreuses situations particulières et privées. Une partie de cette réponse doit inclure une évaluation de l’attitude d’IBM vis-à-vis du concept d’individualisme.

Il me semble que de nombreux dispositifs d’accès aux ordinateurs actuellement en cours de développement démontrent qu’IBM, plus que toute autre grande entreprise américaine, a plus à gagner d’une augmentation (et certainement pas d’une diminution) des activités contrôlées et différenciées individuellement. La démonstration sans équivoque par IBM de cet intérêt futur pourrait contribuer à développer les relations commerciales actuelles avec un public plus large d’utilisateurs non spécialistes.

Conséquences des actions pour IBM

Les cinq sections suivantes traitent de certains domaines d’action généraux liés aux problèmes abordés dans ce mémo.

Évaluer l’importance commerciale de l’utilisateur non spécialiste pour IBM

La note qui précède dépend d’une interprétation subjective selon laquelle les nouveaux publics d’utilisateurs seront importants pour IBM. Cependant, les problèmes liés au développement d’une nouvelle relation avec ces utilisateurs seront probablement si nouveaux pour IBM et impliqueront un ensemble si diffus de publics et de problèmes que seul un effort majeur destiné à établir clairement une nouvelle relation d’IBM avec ces utilisateurs a une chance de réussir.

De ce point de vue, je dirais que ce n’est que lorsqu’on aura estimé l’importance monétaire de ces utilisateurs pour IBM (aujourd’hui et peut-être dans cinq ans) que le type d’effort planifié que je prévois sera nécessaire pourra obtenir un soutien adéquat. De même, des évaluations plus réalistes des contraintes de temps et du calendrier des investissements pour travailler sur ce problème ne peuvent être élaborées que si la valeur monétaire de la solution au problème a été estimée.

La nécessité de plans intégrés couvrant tous les segments d’audience

Au fur et à mesure que le nombre de situations différentes d’utilisateurs se développe au niveau opérationnel, il me semble que les opérations sur titre doivent êtres faites en s’assurant que les types de politiques et d’actions qu’elles prennent ont la valeur monétaire maximale pour IBM au niveau concret des ventes et des profits réalisés. En outre, à mesure que le nombre d’utilisateurs se multiplie, il est probable qu’IBM devra s’assurer que les conflits entre ses nombreux intérêts sont résolus de manière à maximiser les intérêts d’IBM à ce niveau opérationnel. Cela suggère que la nouvelle situation pourrait nécessiter l’examen de nouveaux modèles de coordination horizontale et verticale de l’action de l’entreprise.

Accorder une importance plus grande aux activités de communication d’entreprise par rapport aux problèmes opérationnels

Lorsque le grand public prend une valeur commerciale pour IBM (comme cela peut être le cas si les utilisateurs non spécialistes de l’informatique deviennent importants pour IBM), il semble que la communication d’entreprise ait un rôle à jouer pour aider IBM au niveau des ventes opérationnelles. Cela suggère, une fois de plus, que la communication de l’entreprise pourrait tirer profit de nouveaux modèles d’intégration verticale et horizontale de ces actions de communication.

Étude des expériences des utilisateurs non spécialistes en matière de services informatiques

Deux études sur les expériences des utilisateurs en matière de services informatiques sont proposées :

  1. Un public plus large d’utilisateurs à temps partiel est désormais exposé aux services informatiques dans le cadre de leur travail. Comment ces publics réagissent-ils aux ordinateurs ? Que disent-ils à leur famille et à leurs amis à propos des ordinateurs et d’IBM ? Quelle est l’importance de ces personnes dans la formation des réactions du public face à la technologie informatique en général et à IBM en particulier ? Quels types de comportements semblent les plus préjudiciables à une utilisation accrue des ordinateurs par les non-spécialistes dès qu’ils s’y intéressent ? Quels types d’attitudes semblent le plus inhiber l’adoption ou le premier contact avec les ordinateurs ? La communication d’entreprise a des intérêts et des activités qui sont directement liés à ces questions, bien que les réponses détaillées à ces questions soient en réalité des questions de recherche en marketing.
  2. De même, dans la mesure où IBM s’attend à ce que les terminaux en ligne installés dans des endroits visibles du public deviennent une réalité commerciale dans un avenir proche, il serait utile qu’IBM réponde à une série de questions similaires à celles de la section 1.

Ici encore, la drection des communications semble avoir un besoin naturel de connaître et d’anticiper certains aspects de l’expérience des utilisateurs de ces terminaux, car ces applications sont susceptibles de multiplier fortement le nombre de personnes qui sont en contact quotidien avec le matériel d’IBM. D’autre part, ces connaissances préalables pourraient être utiles à la direction de la division et de l’entreprise pour la prise de décisions en matière d’action et de politique.

Problèmes juridiques et moraux de la relation homme-machine

Il me semble que la réputation d’IBM en tant qu’agent responsable qui se soucie de l’utilisateur individuel est liée à la manière dont IBM comprend la relation réelle que l’utilisateur veut et pourrait avoir dans la relation d’utilisation. Il me semble qu’une telle compréhension peut être très utile dans la formulation de la politique de l’entreprise, dans le développement de produits et dans l’élaboration de communications efficaces. De la même manière, il semble qu’une compréhension superficielle de la relation entre l’utilisateur et l’ordinateur ait le plus de chances de se refléter dans les communications et d’autres activités générales de l’entreprise, nuisant ainsi à ce qui me semble être une crédibilité incontestable d’IBM (à savoir qu’elle se soucie réellement du bien-être de l’utilisateur individuel).

La compréhension des questions juridiques et morales dans la relation homme-machine est un aspect important de la situation de l’utilisateur, et un aspect pour lequel une analyse précoce de la part d’IBM pourrait revêtir une importance à la fois historique et commerciale. L’insistance précoce de Bell Telephone sur les droits de l’individu à la vie privée n’était, à mon avis, qu’un reflet de leur compréhension plus large de ce que le téléphone devrait devenir dans la vie des gens s’il devait vraiment être largement accepté. Je suppose qu’une telle compréhension de ce que l’ordinateur devra devenir dans la vie des futurs utilisateurs est maintenant nécessaire si IBM veut maintenir sa position de leader dans le domaine du traitement des données. Ce n’est qu’à cette condition qu’IBM pourra savoir quel type d’entreprise elle devra devenir pour opérer avec succès (et être reconnue comme digne de confiance) dans le domaine public au sens large. Qu’IBM traite à l’avenir directement avec le public ou qu’elle le fasse par le biais d’intermédiaires n’a, à mon avis, aucune importance, car elle devra comprendre le nouveau climat commercial aussi bien, sinon mieux, que ses partenaires commerciaux si elle veut réussir.

Quelles sont donc ces questions juridiques et morales ? La plupart d’entre elles ont été soulevées sous une forme ou une autre en ce qui concerne le mode en ligne, et il est plus facile d’en discuter dans ce contexte.

Le premier problème soulevé a été celui de la vie privée des individus. Les terminaux actuels du PROJECT MAC au MIT exigent que chaque utilisateur tape un code secret avant que l’ordinateur ne l’identifie ou ne lui affiche un résultat. Doit-on garantir, en principe, que les comportements d’utilisation des utilisateurs ne seront pas mis à la disposition d’une personne extérieure ? Comment définir les termes « comportements d’utilisation » et « personne extérieure » ? Quelles précautions seraient considérées comme suffisantes par IBM ? Quelles informations seraient considérées comme suffisantes par IBM pour que d’autres puissent croire qu’un acte a été accompli en connaissance de cause et avec leur consentement implicite ? Quelles sont les restrictions qu’IBM pourrait appliquer dans des situations d’applications indésirables ? Comment pourrait-on classer une violation de la « vie privée » dans le cas du calcul en ligne ?

Concernant les machines destinées à l’enseignement, un autre point est susceptible d’être soulevé en ce qui concerne la vie privée. Il est clair que l’on peut désormais savoir quelque chose sur un élève à partir de son comportement sur le terminal, et ces informations sont très faciles à stocker et à analyser car elles sont déjà sous forme numérique. Est-ce que ces informations doivent être accessibles aux enseignants de l’élève ? Nous répondons, a priori, « oui », mais ajoutons un autre aspect à la situation. Disons que des informations très intimes sur l’élève – du type de celles que l’on obtient par l’analyse de tests psychologiques et d’entretiens approfondis – pourraient être développées à partir de ces données comportementales. Sommes-nous toujours sûrs que les informations stockées et analysées par ordinateur doivent être accessibles aux enseignants de l’élève ? L’institution a-t-elle la responsabilité d’informer l’élève qu’une telle analyse est faite à son sujet ?

Il y a d’autres questions, mais une autre mérite d’être mentionnée, celle de la « tromperie de l’individu » avec un terminal. Est-ce qu’un système de recherche doit informer un individu que les informations auxquelles il a accès sont modifiées en fonction des questions qu’il pose ? Doit-on dire à un patient dans un hôpital psychiatrique qu’il « parle » (via un terminal de machine à écrire) à un programme informatique (on en parle déjà ; un programme de dialogue a été testé pendant un an dans le cadre d’un projet de développement de langage informatique au MIT) ?

Il ne s’agit pas, à mon avis, de problèmes imaginaires car ils ne dépendent pas d’applications futuristes, de faisabilités techniques, et n’anticipent pas, je pense, de manière déraisonnable les questions du public.

Par ailleurs, toutes ces questions sont pertinentes pour IBM, car la compréhension qu’a IBM de ces problèmes concrets pourrait l’aider à prendre des positions très rationnelles et finalement bénéfiques pour IBM sur ces questions au fur et à mesure de leur développement. Plus important encore, je ne crois pas, si l’on accepte le développement public et privé de ces questions, qu’IBM puisse traiter ces questions en prétendant seulement être une entreprise responsable. Si et lorsque ces questions seront évoquées, ceux qui les soulèveront testeront la responsabilité d’IBM en cherchant à savoir dans quelle mesure IBM les a réellement analysées. C’est dans l’intérêt du développement de cette réputation, en tant qu’objectif minimum, que je suggère une analyse et une évaluation sérieuses des questions ci-dessus. D’un point de vue plus progressiste, j’espère que la compréhension de ces questions pourrait aider IBM à élaborer des politiques claires qui feraient « mouche » aux yeux de tous, montrant ainsi qu’elle est prête à gérer de manière responsable ses nouvelles relations commerciales. Je suis fermement convaincu que la clé des nouvelles relations commerciales d’IBM réside dans sa capacité à affirmer qu’elle est plus responsable et plus compétente dans le traitement de toute la gamme des problèmes informatiques de nouvelle génération. Il me semble qu’une étude approfondie des problèmes moraux et juridiques liés à l’utilisation de l’ordinateur par l’homme pourrait permettre à IBM de commencer à développer ses compétences dans cet aspect important du nouvel environnement informatique.

HARWOOD, John. « Early Computer Interface Design: Two Archival Documents », Design Issues, vol. 31, n° 2, 2015, p. 41-58. © 2015 by the Massachusetts Institute of Technology. All rights reserved doi: https://doi.org/10.1162/DESI_a_00321


  1. Edgar Kaufmann Jr. à Eliot Noyes, 13 juin 1957, Archives Eliot Noyes.↩︎

  2. John HARWOOD. The Interface: IBM and the Transformation of Corporate Design, 1945-1976. Minneapolis : University of Minnesota Press, 2011, chap. 2.↩︎

  3. Eliot Noyes, discours à l’université de Yale, 8 décembre 1976, cité dans Gordon BRUCE. Eliot Noyes: A Pioneer of Design and Architecture in the Age of American Modernism. Londres : Phaidon, 2006, p. 146.↩︎

  4. Cette accusation est relatée dans Franklin M. FISHER, James W. McKIE et Richard B. MANCKE. IBM and the US Data Processing Industry: An Economic History. New York : Praeger, 1983, p. 36.↩︎

  5. Serge Boutourline Jr. à Robert S. Lee, mémorandum, Re : « IBM’s business relations with non-specialist computer users », 24 novembre 1964 [transmis par Lee à Charles Eames, 20 juillet 1965], Box 146, Folder 8, « General correspondence, 1964-1970, n.d. », Charles and Ray Eames Collection, Library of Congress.↩︎

  6. Voir Fred TURNER. From Counterculture to Cyberculture: Stewart Brand, the Whole Earth Network, and the Rise of Digital Utopianism. Chicago et Londres : University of Chicago Press, 2008.↩︎

  7. Charles Eames, « Robin-Draft 3/1 » [1966], Box 146, Folder 12, « Notes, ‘Notion writing’, 1966, n.d. », Charles and Ray Eames Collection, Library of Congress.↩︎